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La Loge d'Aymeric

Le Barbier de Séville (TCE, Malgoire)

29 Avril 2014, 12:22pm

Publié par Aymeric

Un Barbier, encore un Barbier, on prend, on ne prend pas dans l'abonnement, on y va, on annule? Quand j'ai vu le Barbier pour la première fois (Châtelet, Spinosi, 2011), j'avais l'impression d'être devant une comédie musicale: le théâtre est au moins aussi important que la musique, on connait tous les airs et la musique par cœur. C'est bien agréable (et certes facile) de se retrouver devant une œuvre dont on est très familier. Donc oui, le Barbier on en reprend. Au risque pourtant que le spectacle ne repose uniquement sur le titre.

Les deux versions que j'avais pu en voir (Châtelet 2011, Bastille 2012) plaçaient ce Barbier dans des couleurs chatoyantes et lumineuses espagnoles, en misant sur la bouffa la plus simple. Ici toutefois, l'élégante scénographie de Schiaretti et Décarsin entraine le spectateur vers d'autres thématiques. A défaut de percevoir un aspect politique (comme cela est expliqué dans le programme), je comprends notamment la cause féminine, aisément perceptible dans la musique. Ainsi le décor est très simple, un grand salon, dont les murs sont ceux d'une cage à oiseau.

Bartholo vérifie donc que son bel oiseau Rosine ne s'en échappe pas, ni par les petites ouvertures (le balcon), ni par le loquet, ni par la grande ouverture du fond. Par un effet de perspective, avec le rideau de fond de scène et un rideau intermédiaire, la cage se retrouve soudainement sous un voile. Les couleurs sont moins de Goya que de Paul Klee.

Les lumières sont la clef de voute de ce spectacle, non pas chatoyantes et exotiques, mais sombres et pourpres, reflétant cette atmosphère de calomnie peinte par Basilio. Si les costumes sont plutôt simples, ils prennent de nouvelles textures grâce à cette lumière.

Ce qui m'a enchanté chez les chanteurs, c'est que la troupe dégageait une certaine sympathie. J'avais l'impression de me retrouver dans quelques vieux livres XIXème sur les spectacles aux Bouffes Parisiennes ou aux Italiens. Quelque chose de très Offenbach dans la comédie, le tout pourtant teinté d'un certain sérieux.

Le niveau vocal n'est pas excellent (après Siragusa-Deshayes lors de mon dernier Barbier c'est difficile), je n'ai pas été conquis par les grands airs habituels, mais par l'ensemble de ces petits airs soli ou en chœur qui entrainent l'histoire. Ravi donc d'entendre les airs s'enchainer, hérités de Mozart, le dernier air, mais aussi le Ziti ziti piano piano, et tous les airs de transition.

Ainsi, la Rosina de Ruth Rosique se sort comme elle peu de Una Voce poca fa, mais les notes les plus dures sont un peu noyées, en revanche je la trouve plein de malice dans la scène de la leçon. Elle est plutôt élégante dans sa robe fin XVIIIème. Almaviva (Juan Antonio Sanabria) a une voix un peu crispante, mais réussit à nous entrainer sous ses divers travestissements avec humour et justesse.

Plus de chance pour Figaro, dont le largo al factotum réussit à éviter les dernières notes. Joan Martin-Royo est certes un très bon clown (il ressemblait à un prestidigitateur de Pinder), mais l'intelligence du personnage ressort directement. Renaud Delaigue souffre de son physique (trop grand, trop jeune) pour nous offrir un Basilio scéniquement acceptable, il ne fait malheureusement pas suffisamment aigri et avide, mais son air de calomnie en fait ressortir la vague destructrice. Une bonne surprise enfin avec la servante Berta pour son unique air sur l'amour, une parenthèse dans l'intrigue joliment menée par Marie Camille Vaquié. Bartholo contribue enfin à l'ambiance générale, avec des airs d'autorité justement placés.

La féminité donc, et surtout la sexualité, ressortent de cette production. Tout le monde semble vouloir être avec Rosine, Bartholo, Basilio, Figaro et Almaviva. Les intentions de ce dernier sont d'ailleurs peu claires et on ne voit pas réellement d'amour, mais surtout beaucoup de désir. Rosine, éternellement au centre de l'œuvre, ici enfin dans sa véritable dimension de femme.

Je ressens des émotions bien différentes de Bastille, pour retrouver quelque chose de plus intimiste, qui convient bien à ce type de répertoire. La direction de Malgoire manque dans l'ensemble de puissance et de rondeur, les chanteurs n'ont pas toujours suffisamment de voix, mais pourtant l'atmosphère du spectacle, son humour, sa mise en scène et l'engagement des chanteurs participent d'un relatif succès.

Le Barbier de Séville (TCE, Malgoire)
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D
Bartolo manque.
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